Stéphane Garelli: „La mondialisation low cost, c'est fini!” — Genève Vision, un nouveau point de vue

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Aujourd’hui, les grands groupes réfléchissent à leur stratégie et à leur présence dans d’autres régions qui pourraient leur être dommageables. Invité dans Forum, Stéphane Garelli, professeur d’économie à l’IMD, estime que « l’invasion russe a mis en évidence une fracture profonde de l’économie mondiale ».

Il s’explique: « les entreprises sont prises entre deux feux. D’un côté, elles sont très sous pression de leur opinion nationale pour avoir une conduite morale irréprochable, et sont également les instruments des volontés politiques des Etats. Et d’un autre côté, quand elles vont dans certains pays comme la Chine ou la Russie, elles sentent une certaine opposition à l’Occident, une irritation profonde à une attitude moralisatrice. »

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Une situation plus tenable

Pour Stéphane Garelli, cette situation n’est plus tenable pour les entreprises: « elles n’arrivent plus à gérer les deux choses. On assiste à une réflexion profonde de ces entreprises, qui se demandent dans quels pays elles peuvent poursuivre leurs activités et quels pays elles doivent quitter. Je crois que la mondialisation low-cost est finie. »

« Ça ne veut pas dire qu’on n’aura plus de téléphones portables ou de télévisions. Mais ça veut dire que ce sera beaucoup plus cher, parce que ce sera fabriqué en Europe, aux Etats-Unis ou au Japon. »

Deux blocs économiques

L’économiste anticipe la création de deux blocs économiques distincts, comme au temps de la Guerre froide. « De plus en plus, les pays comme la Chine et la Russie vont se mettre ensemble pour créer une sorte d’univers parallèle dans lequel ils vont faire du commerce entre eux sans les Occidentaux. C’est une sorte de nouveau Mur de fer, à la grande différence que dans le passé, sous le communisme, c’était répartir la misère et la pauvreté pour tout le monde, alors que là on parle de pays qui sont riches. »

Stéphane Garelli dresse un portait de ce nouveau bloc: « Il faut regarder la liste des pays qui se sont abstenus lors de la résolution des Nations unies sur la Russie. Il y a évidemment la Russie et la Chine, mais il y a aussi quelques pays auxquels on ne s’attendait pas, comme les Émirats arabes unis, l’Afrique du Sud ou l’Inde. Et tous ces pays sont en train de se dire que s’ils se mettent ensemble, ils peuvent très bien vivre sans l’Occident. »

Propos recueillis par Mehmet Gultas

Version web: Antoine Schaub