Salman Rushdie sous assistance respiratoire après avoir été poignardé sur scène aux Etats-Unis — Genève Vision, un nouveau point de vue

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Grièvement blessé

Salman Rushdie a été placé sous assistance respiratoire après avoir été poignardé au cou alors qu’il s’apprêtait à participer à une conférence dans l’Etat de New York, aux Etats-Unis, a déclaré vendredi son agent, précisant que l’écrivain avait été gravement blessé.

L’évacuation de Salman Rushdie par hélicoptère vers un hôpital new yorkais. [HoratioGates3 – Keystone].

« Les nouvelles ne sont pas bonnes. Salman devrait vraisemblablement perdre un oeil, les nerfs de son bras ont été sectionnés, et il a été poignardé dans le foie, qui a été endommagé », a annoncé Andrew Wylie dans un communiqué.

Rushdie’s agent, Andrew Wylie, sent an update on his condition to NYT, saying Rushdie was on a ventilator and could not speak. “The news is not good, » he said. « Salman will likely lose one eye; the nerves in his arm were severed; and his liver was stabbed and damaged. »

— Josie Ensor (@Josiensor) August 12, 2022

Salman Rushdie, né en 1947 à Bombay en Inde, deux mois avant son indépendance de l’Empire britannique, essaie de ne pas être réduit au scandale provoqué par la publication des « Versets sataniques », qui avait embrasé le monde musulman et conduit en 1989 à une « fatwa » demandant son assassinat. Les fondamentalistes jugent son ouvrage « Les versets sataniques » blasphématoire à l’égard du Coran et de Mahomet.

Les précisions de Gaspard Kühn, correspondant à Washington

Symbole de la lutte contre l’obscurantisme

« Mon problème, c’est que les gens continuent de me percevoir sous l’unique prisme de la ‘fatwa’ », avait dit il y a quelques années ce libre-penseur qui se veut écrivain, pas symbole.

Mais l’actualité – la montée en puissance de l’islam radical – n’a cessé de le ramener à ce qu’il a toujours été aux yeux de l’Occident: le symbole de la lutte contre l’obscurantisme religieux et pour la liberté d’expression. Déjà en 2005, il considérait que cette « fatwa » avait constitué un prélude aux attentats du 11 septembre 2001.

Beaucoup des traducteurs de son livre ont été blessés par des attaques, voire tués, comme le Japonais Hitoshi Igarashi, victime de plusieurs coups de poignard en 1991.

Son livre, a-t-il par ailleurs expliqué depuis, a été « grandement incompris ». « Il s’agissait en réalité d’un roman qui parlait des immigrés d’Asie du sud à Londres et leur religion n’était qu’un aspect de cette histoire-là », a-t-il dit.

Une vie de clandestinité

Contraint dès lors de vivre dans la clandestinité et sous protection policière, allant de cache en cache, il se fait appeler Joseph Anton, en hommage à ses auteurs favoris, Joseph Conrad et Anton Tchekhov. Il doit affronter une immense solitude, accrue encore par la rupture avec sa femme, la romancière américaine Marianne Wiggins, à qui « Les versets… » sont dédiés.

Mais, à partir de 1993, fatigué d’être « un homme invisible », il multiplie les voyages et les apparitions publiques, tout en restant sous surveillance du gouvernement britannique.

Installé à New York depuis quelques années, Salman Rushdie – sourcils arqués, paupières lourdes, crâne dégarni, lunettes et barbe – avait repris une vie à peu près normale tout en continuant de défendre, dans ses livres, la satire et l’irrévérence.

ats/cab/vajo

Boris Johnson se dit « atterré », Emmanuel Macron affiche son soutien

Le Premier ministre britannique Boris Johnson s’est dit « atterré » par l’agression dont a été victime son compatriote l’écrivain Salman Rushdie aux Etats-Unis.

Je suis « atterré que Sir Salman Rushdie ait été poignardé alors qu’il exerçait un droit que nous ne devrions jamais cesser de défendre », a-t-il réagi dans un tweet, en allusion à la liberté d’expression.

Appalled that Sir Salman Rushdie has been stabbed while exercising a right we should never cease to defend.

Right now my thoughts are with his loved ones. We are all hoping he is okay.

— Boris Johnson (@BorisJohnson) August 12, 2022

Emmanuel Macron a également apporté vendredi son soutien à l’écrivain Salman Rushdie, assurant que « nous sommes aujourd’hui, plus que jamais, à ses côtés ».

« Depuis 33 ans, Salman Rushdie incarne la liberté et la lutte contre l’obscurantisme. La haine et la barbarie viennent de le frapper, lâchement », a affirmé le chef de l’Etat français sur Twitter, affirmant que « son combat est le nôtre, universel ».

Anobli en 2007 par la reine

Anobli en 2007 par la reine d’Angleterre, au grand dam des extrémistes musulmans, ce maître du réalisme magique, homme d’une immense culture qui se dit apolitique, a écrit en anglais une quinzaine de romans, récits pour la jeunesse, nouvelles et essais.

Salman Rushdie, dont la langue maternelle est l’ourdou, est né le 19 juin 1947 en Inde, à Bombay (ou Mumbai) au sein d’une famille d’intellectuels musulmans non pratiquants, riche, progressiste et cultivée.

A 13 ans, il part suivre ses études en Angleterre. Après être passé par l’université de Cambridge, il travaille au Pakistan, comme producteur à la télévision. En butte à une censure permanente, il revient à Londres, gagnant sa vie dans la publicité.

Son premier roman célèbre est « Les enfants de minuit », qui obtient le Booker Prize en 1981. Suivent « La honte » (prix 1985 du meilleur livre étranger en France), « Le dernier sourire du Maure », « La terre sous les pieds », « Shalimar le clown » ou « L’enchanteresse de Florence ».

Des fictions où cet amateur d’odyssées fantastiques parle souvent de l’Inde et de ses relations avec l’Occident et dénonce le manque de repères qui, selon lui, déstabilise le monde depuis des années.

L’assaillant de Salman Rushdie félicité par la presse iranienne

Le principal quotidien ultraconservateur iranien, Kayhan, a félicité samedi l’homme ayant poignardé la veille aux Etats-Unis l’écrivain britannique mondialement connu Salman Rushdie.

« Bravo à cet homme courageux et conscient de son devoir qui a attaqué l’apostat et le vicieux Salman Rushdie », écrit le journal, dont le patron est nommé par le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei. « Baisons la main de celui qui a déchiré le cou de l’ennemi de Dieu avec un couteau », poursuit le texte.