Quel avenir pour les aéroports internationaux? — Genève Vision, un nouveau point de vue

0

Mais quel sera l’avenir pour les grands aéroports internationaux qui auront survécu lorsque les vols reprendront? Vont-ils poursuivre leur expansion? Le nouvel aéroport de Berlin, inauguré sans fanfare en octobre dernier, a déjà fermé l’une de ses aérogares.

La pression écologique

Ces aéroports, dont les actionnaires sont souvent les Etats ou les collectivités publiques, étaient déjà mis sous pression bien avant la crise par la montée des revendications environnementales. Ainsi, le projet d’une troisième piste à l’aéroport de Heathrow, à Londres, était déjà controversé avant la crise et sa réalisation encore incertaine.

Celui d’une quatrième gare à Paris Charles de Gaulle a lui été tout bonnement annulé, relate John Strickland. Le gouvernement français exige du groupe ADP, propriétaire de cet aéroport, de proposer un nouveau projet intégrant le développement d’avions électriques ou propulsés par hydrogène, ce qui risque de prendre de nombreuses années.

La concurrence entre compagnies aériennes

Les pressions écologiques ne sont pas les seules à vouloir freiner ces projets d’extension. Certaines compagnies aériennes elles-mêmes s’y opposent pour protéger leur marché, explique Andreas Wittmer, responsable du département aviation à l’université de Saint-Gall.

« Par exemple, la moitié des vols qu’une nouvelle piste à l’aéroport d’Heathrow permettrait d’opérer devrait, selon les accords, aller à de nouvelles compagnies, donc des concurrentes de British Airways. Or, la compagnie britannique a un quasi-monopole et risque ainsi de perdre des parts de marché, de devoir augmenter ses tarifs, ce qu’elle ne peut pas se permettre par les temps qui courent. » Même Easyjet, qui opère pourtant sur Gatwick, s’oppose pour les mêmes raisons à cette troisième piste.

Réinventer un modèle économique

Les aéroports doivent trouver d’autres modèles économiques et poursuivre une mue déjà entamée avant la crise. « On va voir les aéroports se développer plutôt côté ville que côté piste avec la multiplication des centres commerciaux », explique Andreas Wittmer.

« L’aéroport de Zurich, par exemple, vient de terminer un Centre de conventions et de magasins qui se projette comme un second centre-ville, destiné à tout le monde, et non seulement aux passagers, afin de ne pas concentrer tous les risques dans le business de l’aviation. »

Le potentiel de croissance en Asie

Les aéroports asiatiques, eux, n’ont pas les mêmes craintes qu’en Europe. Avant la crise, le trafic aérien y augmentait deux fois plus vite que sur le Vieux continent et le potentiel y est encore grand. Andreas Wittmer rappelle qu’actuellement, seule 10% de la population indienne prend l’avion, un chiffre qui va sans doute croître fortement lorsque la demande reprendra.

« La demande globale pour le transport aérien est énorme. En Europe, nous sommes une quantité négligeable. En Asie notamment, la croissance de la classe moyenne va faire augmenter les chiffres du trafic aérien de la Turquie à la Chine, de Dubaï au Moyen-Orient en passant par l’Éthiopie, afin de connecter le reste du continent africain. »

Ainsi, des hubs à sept ou huit pistes sont en construction pour accueillir tous ces nouveaux passagers, lorsque des solutions, technologiques peut-être, permettront de régler les problèmes de foule et de distanciation sociale.

Francesca Agriroffo/mh