„Personne n'aurait parié un franc sur une telle résistance”, estime l'ambassadeur suisse en Ukraine — Genève Vision, un nouveau point de vue

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Près de trois mois plus tard, le diplomate est donc de retour sur place, dans une ville où le pire semble être passé.

« C’est un sentiment un peu bizarre. Il y a ici une atmosphère de quasi normalité dans un pays en guerre. L’Ukraine a gagné la bataille de Kiev mais dans la bataille pour l’Ukraine, pour le Donbass et pour le sud du pays, tout est encore ouvert », explique-t-il.

Revoir le reportage du 12h45 sur les 3 mois de guerre en Ukraine

« L’asymétrie est encore en faveur des Russes »

Cette réussite autour de la capitale a été une surprise pour tout le monde, estime l’ambassadeur. La capacité de l’Ukraine à résister à l’envahisseur n’avait été pronostiquée par personne, d’après lui.

« Avec la disproportion qui existe entre la puissance de feu des deux armées, qui aurait cru que l’Ukraine ait pu tenir aussi longtemps, faire même des contre-offensives, gagner la bataille de Kiev, infliger autant de pertes à la puissante armée russe? Personne n’aurait parié un franc là-dessus fin février », détaille-t-il.

Pour autant, Claude Wild juge la situation encore périlleuse pour l’Ukraine, car « l’asymétrie est encore totalement en faveur des Russes ». Un rappel que le diplomate tempère avec une pointe d’optimisme. « Ce qui est certain, c’est que pour gagner une guerre, il faut aussi être fort au moral. Là, l’Ukraine a montré qu’elle était très nettement plus motivée que le soldat russe moyen, qui ne sait pas très bien ce qu’il vient faire là. Alors qu’en Ukraine, les soldats se battent pour l’existence de leur nation, de leur Etat, pour leur liberté et pour leur sol. »

Une agression contre « le système de sécurité en Europe »

Mais Claude Wild reconnaît ne pas avoir « de boule de cristal » lui permettant d’anticiper l’issue du conflit. Quand il avait dû fuir à la fin du mois de février, l’ambassadeur avait dit craindre un embrasement incontrôlé. Près de 90 jours plus tard, il se refuse encore à mettre ce scénario de côté. « On a toujours le sentiment qu’on ne sait pas jusqu’où va nous mener cette agression », explique-t-il.

« Aujourd’hui, c’est l’Ukraine qui paie le prix du sang, mais nous sommes derrière les valeurs qui sont défendues ici, c’est d’ailleurs pour ça que nous participons aux sanctions. Il s’agit aussi d’une agression contre le système de sécurité en Europe, qui est aussi notre sécurité », conclut-il.

Propos recueillis par Philippe Revaz

Adaptation web: Tristan Hertig