L'ONG Human Rights Watch dénonce des „crimes de guerre manifestes” au Tigré — Genève Vision, un nouveau point de vue

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Le nord de l’Ethiopie est ravagé par de violents combats depuis novembre, lorsque le Premier ministre Abiy Ahmed a envoyé l’armée au Tigré pour destituer les autorités régionales issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qu’il accuse d’avoir orchestré des attaques contre des camps militaires.

Le régime érythréen – ennemi juré du TPLF, qui dirigeait l’Ethiopie lors du sanglant conflit frontalier entre les deux pays de 1998 à 2000 – a soutenu militairement Addis Abeba en envoyant des troupes dans cette région qui borde sa frontière sud.

Réfugiés au milieu du champ de bataille

Avant le début du conflit, 92’000 réfugiés érythréens se trouvaient au Tigré, dont 19’200 dans les camps de Hitsats et de Shimelba, selon l’Agence éthiopienne pour les réfugiés et les rapatriés (ARRA). Les forces érythréennes et tigréennes s’y sont affrontées, prenant entre deux feux les réfugiés érythréens, qui paient un lourd tribut.

HRW affirme avoir reçu des « informations crédibles » selon lesquelles les troupes érythréennes ont tué 31 personnes dans la ville de Hitsats. Mais le véritable bilan est « probablement beaucoup plus élevé », ajoute l’ONG. Lorsque les Érythréens ont pris le contrôle du camp, ils auraient transporté 17 réfugiés blessés en Érythrée pour y être soignés, selon le rapport de HRW.

Selon l’Agence France Presse (AFP), des miliciens pro-rebelles auraient ciblé des réfugiés dans le cadre de représailles, tuant neuf jeunes Erythréens devant une église.

Après avoir repris le contrôle de la zone début décembre, les forces tigréennes ont commencé à voler, emprisonner, violer et attaquer les réfugiés avec des armes, dont une grenade, faisant potentiellement des dizaines de morts, affirme HRW. Les forces érythréennes sont revenues le mois suivant et ont forcé ceux qui restaient dans les camps à partir.

Les réfugiés doivent fuir

Les camps presque entièrement détruits, certains réfugiés n’avaient d’autre choix que de retourner en Erythrée, dans ce que HRW qualifie de « rapatriements forcés ». Par ailleurs, des milliers de personnes sont portées disparues. Les autorités éthiopiennes tentent d’accélérer la réinstallation d’autres réfugiés du sud du Tigré vers un site de 90 hectares dans la région de l’Amhara, voisine du Tigré. Mais la région a été gagnée par les combats en juillet.

« Les meurtres horribles, les viols et les pillages contre les réfugiés érythréens au Tigré sont clairement des crimes de guerre », dénonce la directrice de HRW pour la Corne de l’Afrique, Laetitia Bader. « Durant de nombreuses années, le Tigré a été un refuge pour les réfugiés érythréens fuyant les persécutions (dans leur pays) », rappelle-t-elle. « Mais aujourd’hui, ils ne s’y sentent plus en sécurité ».

afp/ami