Les talibans interdisent cette fois aux femmes de travailler pour les ONG — Genève Vision, un nouveau point de vue

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« En cas de négligence de la directive (…), la licence de l’organisation qui a été délivrée par ce ministère sera annulée », précise le courrier qui s’adresse aux ONG nationales et internationales.

Une ONG suspend son action humanitaire

Deux ONG internationales auxquelles l’AFP a parlé ont confirmé avoir reçu le communiqué du ministère. « Nous suspendons toutes nos activités à partir de dimanche », a déclaré à l’AFP, sous couvert d’anonymat, un haut responsable d’une organisation internationale impliquée dans l’action humanitaire dans plusieurs régions reculées du pays.

Deuxième décision de la semaine

Cette annonce intervient quatre jours seulement après la décision du gouvernement taliban d’interdire aux femmes afghanes de suivre des cours dans les universités publiques et privées du pays pour une durée indéterminée.

Le ministre de l’Enseignement supérieur, Neda Mohammad Nadeem, a expliqué deux jours après cette annonce avoir pris cette décision car les « étudiantes qui se rendaient à l’université (…) ne respectaient pas les instructions sur le hijab ».

>>Lire: Les femmes afghanes « temporairement » exclues des universités par les talibans

Loin des promesses faites en 2021

Cette nouvelle atteinte aux droits des femmes a été un choc pour de nombreuses jeunes Afghanes déjà exclues des écoles secondaires et suscité des condamnations internationales. En dépit de leurs promesses de se montrer plus souples, les talibans sont revenus à l’interprétation ultra-rigoriste de l’islam qui avait marqué leur premier passage au pouvoir (1996-2001).

Depuis 16 mois, les mesures liberticides se sont multipliées en particulier à l’encontre des femmes qui ont été progressivement écartées de la vie publique et exclues des collèges et lycées.

Dans une volte-face inattendue, le 23 mars, les talibans avaient refermé les écoles secondaires quelques heures à peine après leur réouverture annoncée de longue date.

« Une guerre menée contre les femmes »

« Il y a une guerre contre les femmes qui est menée, il y a un durcissement », confirme le journaliste et écrivain Jean-Pierre Perrin dans l’émission Forum de la RTS. « Mais je crois qu’on a mal interprété la ou les pensée(s) des talibans », précise-t-il. « Les talibans qui ont négocié à Doha avec l’armée américaine pour négocier son retrait ne sont pas ceux qui ont actuellement le pouvoir ».

Il y a une grosse différence entre certaines tendances, ajoute ce spécialiste. Et pour le moment, c’est la tendance la plus idéologique qui a le pouvoir et qui entend mener à bien tout ce qu’elle peut faire pour punir les femmes ».

Bannies aussi des emplois publics

En plus d’être privées d’étudier, les femmes sont également bannies de la plupart des emplois publics ou payées une misère pour rester à la maison. Elles n’ont pas le droit non plus de voyager sans être accompagnées d’un parent masculin et doivent se couvrir d’une burqa ou d’un hijab lorsqu’elles sortent de chez elles.

En novembre, les talibans leur ont également interdit d’entrer dans les parcs, jardins, salles de sport et bains publics.

afp/oang

L’UE « condamne fermement » et Washington se dit « très inquiet »

Bruxelles a immédiatement réagi à ce nouveau palier franchi dans les interdictions imposées aux femmes afghanes.

« L’Union européenne condamne fermement la décision récente des talibans d’interdire aux femmes de travailler dans les ONG nationales et internationales », a déclaré une porte-parole du chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, dans un communiqué transmis à l’AFP. « Nous évaluons la situation et l’impact qu’elle aura sur notre aide sur le terrain », a-t-il ajouté.

Le secrétaire d’Etat Antony Blinken, de son côté, a mis en garde contre des conséquences « dévastatrices » pour l’Afghanistan. « Je suis très inquiet, a-t-il tweeté. « Cette décision peut être dévastatrice pour le peuple Afghan », a-t-il ajouté.