Les organisations internationales alertent : la famine menace l’Afghanistan — Genève Vision, un nouveau point de vue

0

Et le représentant du CICR de renchérir : « Les sanctions économiques censées punir les personnes au pouvoir à Kaboul ne font que priver des millions d’Afghans des biens et services essentiels dont ils ont besoin pour survivre. La communauté internationale tourne le dos au pays tandis qu’il court à une catastrophe provoquée par l’homme ».

À l’hôpital régional Mirwaïs de Kandahar soutenu par le CICR, le nombre d’enfants souffrant de malnutrition, de pneumonie et de déshydratation a plus que doublé entre mi-août et fin septembre. La malnutrition est en hausse de 31% dans les environs de Kandahar par rapport à la même période en 2020. Le taux de malnutrition infantile est jusqu’à trois fois supérieur au seuil d’urgence dans certaines régions. Le pays est plongé dans une grave crise alimentaire que la saison hivernale ne manquera pas d’aggraver, estime le CICR.

« Éviter des conséquences irréversibles sur le plan humanitaire »

Le Programme alimentaire mondial (PAM) précise que si la famine n’a pas été déclarée en Afghanistan, la faim sévère est généralisée. « Plus de la moitié de la population est confrontée à la faim et 3,2 millions d’enfants souffrent de malnutrition. Les besoins humanitaires ont triplé et continueront d’augmenter avec l’hiver rigoureux qui s’installe. Des centaines de milliers – peut-être des millions – d’Afghans innocents risquent de mourir dans cette nouvelle guerre de la faim », affirme Tomson Phiri, son porte-parole.

Les chiffres avancés par le PAM sont éloquents : 98% des Afghans sont confrontés à une consommation alimentaire insuffisante. La moitié des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition aiguë ; 1 million d’entre eux pourraient mourir de la forme la plus sévère si le traitement ne les atteint pas à temps. La crise économique a créé une nouvelle classe de personnes qui ont faim. Pour la première fois, les citadins souffrent d’insécurité alimentaire à des taux similaires à ceux des communautés rurales, qui avaient été ravagées par la sécheresse à deux reprises au cours des trois dernières années.

Les sanctions financières ont ruiné l’économie afghane, entravant également l’aide bilatérale, explique Florian Seriex, en charge des relations publiques du CICR. « Une solution politique doit être trouvée afin d’éviter des conséquences irréversibles sur le plan humanitaire. Nous demandons que les organisations humanitaires impartiales, menant des activités humanitaires, bénéficient d’exceptions claires, transposées dans les législations nationales. Mais cela n’est pas suffisant, nous appelons la communauté internationale à trouver rapidement des solutions pour sauver des millions d’Afghans de la misère et du désespoir ».

Dialoguer ou pas avec les Talibans ? Un dilemme. Les considérations politiques ne doivent pas faire obstacle à l’action humanitaire. Seule certitude : une solution politique doit être trouvée pour éviter des conséquences irréversibles sur le plan humanitaire.

Un appel humanitaire historique

Le 7 décembre, l’UNICEF (Fonds des Nations Unies pour l’enfance) a lancé le plus grand appel jamais demandé pour un pays, afin de répondre d’urgence aux besoins humanitaires de plus de 24 millions de personnes en Afghanistan, dont la moitié sont des enfants. L’appel de l’UNICEF pour 2 milliards de dollars US permettra d’éviter l’effondrement imminent des services de santé, de nutrition, d’eau, d’assainissement et d’hygiène, d’éducation et d’autres services sociaux vitaux pour les enfants et les familles.

« La situation humanitaire actuelle en Afghanistan est désastreuse, en particulier pour les enfants. L’hiver s’est déjà installé et, sans financement supplémentaire, l’UNICEF et ses partenaires ne seront pas en mesure d’atteindre les enfants et les familles qui ont le plus besoin de nous », a déclaré Alice Akunga, représentante de l’UNICEF en Afghanistan par intérim, dans un communiqué.

Luisa Ballin