Le National désavoue le Conseil fédéral sur le rachat de Credit Suisse — Genève Vision, un nouveau point de vue

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L’Etat a lui apporté sa garantie pour un montant de 109 milliards de francs. Un premier crédit de 100 milliards permet de garantir les prêts octroyés par la BNS à Credit Suisse. Le second de 9 milliards est destiné à UBS. Ce sont ces deux enveloppes qui ont été rejetées par 102 voix contre 71, grâce à une « alliance contre-nature » de la gauche et de l’UDC au National.

La décision n’est toutefois pas définitive. Le projet doit repasser devant les sénateurs. Même si ces derniers retournaient leurs vestes et refusaient finalement les crédits, l’impact du vote serait quasi-inexistant, car les montants ont déjà été engagés. Le rejet des députés résonne plus comme un désaveu du gouvernement.

Garde-fous supplémentaires rejetés

Le parti conservateur a rejeté d’entrée de jeu les crédits. « Dans le sillage du sauvetage d’UBS, nous avons réclamé une solution à la problématique des ‘too big to fail’. Mais l’alliance du PLR et du Centre a fait échouer le projet », a accusé Thomas Aeschi (UDC/ZG). Et d’estimer que des banques trop grandes pour faire faillite ne devraient plus exister en Suisse.

Le camp rose-vert aurait pu accepter les crédits, sous conditions. Il a exigé des garde-fous plus stricts pour les grandes banques. Les bonus doivent notamment être réduits et le ratio de fonds propres relevé. « L’idée n’est pas de régler tous les détails déjà maintenant. Il s’agit de fixer des filets de sécurité plus élevés pour la place financière », a expliqué Mattea Meyer (PS/ZH), critiquant l’inaction passée de la majorité bourgeoise du Parlement.

Voir le commentaire de Valérie Gilloz, dans le 19h30, sur la fronde au sein du Parlement

Vote favorable des sénateurs

Plus tôt dans la journée, les sénateurs ont avalisé après cinq heures de débats les crédits urgents soumis au Parlement d’un montant total de 109 milliards de francs par 29 voix contre 6 et 7 abstentions. Mais les critiques ont fusé pour dénoncer les manquements qui ont mené à la crise.

La chute de Credit Suisse est très douloureuse, que ce soit pour les collaborateurs, les épargnants, mais aussi pour les entreprises, a déclaré Hansjörg Knecht (UDC/AG). « De tels événements sapent la confiance dans notre économie et dans notre Etat. » Il faut désormais redouter le risque que fait courir UBS, de par sa taille, à la Suisse, a-t-il dit.

« La débâcle de Credit Suisse est une grande catastrophe pour la Suisse, sociale, politique et économique », a renchéri Benedikt Würth (Centre/SG). « Le dégât collatéral est énorme ». Du point de vue libéral, il est « déroutant » que l’argent du contribuable serve à rattraper les erreurs d’une entreprise privée, a regretté Olivier Français (PLR/VD).

Les explications dans Forum

Dirigeants de Credit Suisse pointés du doigt

La plupart des intervenants ont fustigé les dirigeants de la grande banque. « Malheureusement, les managers de Credit Suisse n’ont rien appris des erreurs du passé », a estimé Peter Hegglin (Centre/ZG). Roberto Zanetti (PS/SO) a parlé de « Bankster irresponsables ». Tout ce gâchis est à mettre au compte de cette « caste de managers », a ajouté Thierry Burkart (AG), président du PLR.

Pour Beat Rieder (Centre/VS), cette affaire suscite un grand ressentiment au sein de la population dont il faut tenir compte. Charles Juillard (Centre/JU) est aussi d’avis qu’on lui doit des explications.

Les sénateurs ont souligné la nécessité de prendre des mesures. Certains ont insisté sur la nécessité de réviser la réglementation des « too big to fail ». Plusieurs veulent renforcer l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA). Tous veulent réduire les risques afin qu’une telle situation ne se reproduise plus. Un postulat a été tacitement adopté pour faire toute la lumière sur la crise bancaire.

Ecouter aussi l’interview du conseiller national Pierre-André Page (UDC/FR) dans Forum

Un rapport sur le rachat

Le rachat de Credit Suisse par UBS devra être étudié sous toutes ses coutures, notamment par l’intermédiaire d’un rapport. Les sénateurs ont tacitement adopté un postulat de commission. Le texte demande des clarifications non seulement sur la taille de la nouvelle banque, mais aussi sur la poursuite des activités de Credit Suisse, la situation concurrentielle d’UBS ainsi que les compétences de la FINMA ou les exigences en matière de fonds propres.

Il s’agit d’un rapport complet sur le fond, qui donne une vision d’ensemble de la situation et non seulement de Credit Suisse, a relevé Johanna Gapany (PLR/FR) pour la commission. Le but est de récolter des informations pour pouvoir examiner si des modifications législatives sont nécessaires. « Nous pouvons et devons travailler pour qu’une telle situation ne se reproduise pas. »

Le Conseil fédéral était également favorable au postulat. Il a déjà annoncé s’engager à rendre un rapport dans un délai d’un an.

edel et vajo avec ats