„L'Amérique n'est plus perçue comme invincible” — Genève Vision, un nouveau point de vue

0

La plus longue guerre des Etats-Unis s’est finalement achevée le 30 août à l’aéroport de Kaboul, après plusieurs jours d’évacuations chaotiques et dans la violence d’un attentat suicide 4 jours plus tôt, qui a fait une centaine de morts, dont 13 soldats américains. Le dernier contingent américain quittait le sol afghan sous les tirs victorieux des talibans de retour au pouvoir.

« Il va falloir laisser retomber l’émotion, légitime, qu’on a tous ressenti après ces images terribles pour vraiment tirer les leçons de ces 20 ans et de ces dernières semaines », commente le député européen Arnaud Danjean invité dans Géopolitis. Cette « débâcle afghane » est surtout une défaite politique et diplomatique, pour ce spécialiste des questions de défense: « L’Amérique n’est plus perçue comme invincible. Elle est aussi perçue comme un pays en repli qui ne veut plus remettre en cause la vie de ses soldats pour des causes lointaines. »

Un désengagement qui intervient au moment où la menace terroriste reste élevée. Les victimes se comptent toujours par dizaines de milliers, principalement en Asie, en Afrique, au Moyen-Orient. Le nombre de terroristes djihadistes aurait même triplé en 20 ans, selon une estimation du think thank américain, le Center for Strategic and International Studies.

L’ombre de Daech

L’attaque à l’aéroport de Kaboul le jeudi 26 août a été revendiquée par le groupe Etat islamique au Khorasan, la branche afghane de l’organisation. En trois ans, le groupe djihadiste a revendiqué plus de 5000 opérations militaires dans une trentaine de pays. Comme la récente attaque contre un puits de pétrole en Irak ; le double attentat-suicide sur un marché à Bagdad qui a fait 32 morts en janvier ; ou encore la fusillade au centre de Vienne qui a fait 4 morts en novembre dernier.

Et pourtant, on pensait le groupe Etat islamique considérablement affaibli depuis la chute de son califat en 2019. Aujourd’hui, l’organisation est sans territoire, son calife autoproclamé al-Baghdadi est mort, tué par un commando américain. Mais ses combattants n’ont pas disparu. Le groupe djihadiste a essaimé principalement en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie. Ses représentants, ou groupes affiliés qui ont prêté allégeance à Daech, représenteraient au total entre 30’000 et 40’000 combattants.

L’Afrique, « terre de mission pour le djihad »

Si l’Afghanistan reste le pays qui subit le plus grand nombre d’attentats, le centre de gravité du terrorisme s’est aujourd’hui déplacé en Afrique. Sur l’ensemble du continent, et en particulier au Sahel, Al-Qaïda, le groupe Etat islamique et d’autres mouvements djihadistes exploitent les terreaux fertiles de la radicalisation. « Dans une Afrique peut-être plus traditionnelle et moins perméable à ces influences jusqu’à présent, on voit se développer un islam radical », s’inquiète Arnaud Danjean. « Je pense que l’Afrique est une terre de mission importante pour le djihad, et que nous devons y prêter beaucoup d’attention. »

Le Burkina Faso est le pays qui a connu la plus grande progression de violences. Avant l’été, le pire attentat de son histoire a fait au moins 160 morts à Solhan dans le nord du pays, la zone dite des trois frontières, où le djihadisme se diffuse depuis le Mali et le Niger. Deuxième pays le plus touché par le terrorisme après l’Afghanistan, le Nigeria fait état d’au moins 30’000 morts depuis l’avènement de Boko Haram en 2009. Autre foyer important, la Somalie où prospèrent le mouvement Shebab qui a fait au moins 45’000 morts, avec des incursions au Kenya ou en Tanzanie.

Mélanie Ohayon, Jean-Philippe Schaller

Vers une déclassification des documents de l’enquête?
Le président américain Joe Biden a ordonné vendredi le lancement d’une réflexion sur une possible déclassification des documents de l’enquête menée par le FBI sur les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.

« Quand je me suis présenté en tant que candidat à la présidence, j’ai pris l’engagement de garantir la transparence sur la déclassification des documents relatifs aux attentats du 11 septembre 2001 contre l’Amérique », a déclaré Joe Biden dans un communiqué.

Le président américain a ajouté qu’il entrerait en contact « respectueusement », à ce sujet, avec les familles des près de 3000 personnes tuées dans ces attentats.