La Turquie envisage une opération terrestre en Syrie — Genève Vision, un nouveau point de vue

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« Les unités compétentes, notre ministère de la Défense et notre état-major décideront ensemble de la puissance qui doit être engagée par nos forces terrestres », a indiqué le président, faisant état de « consultations » en cours. « Nous avons déjà prévenu: nous ferons payer ceux qui nous dérangent sur notre territoire », a-t-il réaffirmé.

La série de raids aériens qui a fait une trentaine de morts dimanche en Syrie a été déclenchée en représailles à l’attentat qui a tué six personnes le 13 novembre à Istanbul, attribué par Ankara aux « terroristes » kurdes.

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Les forces kurdes ripostent

Les forces kurdes avaient juré vengeance après ces raids massifs. Dimanche soir et lundi matin des tirs de roquettes depuis la Syrie ont ainsi touché la frontière et le territoire turcs faisant, au total, trois morts et une quinzaine de blessés.

La ville de Karkamis, dans la province de Gaziantep, a été touchée. Les tirs ont frappé des habitations et la cour d’un lycée, tuant notamment un enfant de quatre ans et une enseignante.

Des raids menés par 70 avions turcs

S’agissant de l’opération « Griffe Epée » lancée dimanche contre le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) et les Unités de Défense du Peuple (YPG), « elle a été menée par 70 avions et drones », a détaillé le président: « Ils se sont enfoncés de 140 km dans le nord de l’Irak et de 20 km dans le nord de la Syrie », a-t-il précisé.

Recep Tayyip Erdogan a par ailleurs assuré n’avoir eu « aucune discussion » avec le président américain Joe Biden ou son homologue russe Vladimir Poutine au sujet de l’opération.

Les Etats-Unis soutiennent les YPG, la principale milice kurde de Syrie, dans le nord-est de la Syrie face aux djihadistes du groupe Etat islamique et la Russie appuie des milices pro-régime dans la même région.

Un contexte électoral

La Turquie brandit la menace d’une opération terrestre depuis le mois de mai, pour laquelle elle cherche l’appui de la Russie et de l’Iran. Mais elle pourrait se concrétiser à l’approche des élections. Recep Tayyip Erdogan et son parti, l’AKP, remettront en effet leur mandat en jeu au plus tard en juin 2023. Et l’un comme l’autre sont en difficulté dans les sondages. Le vote des Kurdes pourrait donc s’avérer décisif.

Le président turc espère séduire cet électorat kurde, mais l’équation est compliquée pour lui: il doit tout d’abord donner des gages à son principal allié, un parti d’extrême-droite ultranationaliste, le MHP, sans lequel il n’a aucune chance de remporter la présidence et la majorité absolue au Parlement.

Et d’un autre côté, il ne peut pas non plus complètement se mettre à dos l’électorat kurde. Il le peut d’autant moins qu’il a face à lui une alliance d’opposition qui peut tout à fait l’emporter si elle parvient à être soutenue, même de façon implicite, par le parti pro-kurde HDP, qui représente environ 15% de l’électorat.

L’analyse d’Anne Andlauer, correspondante en Turquie, dans Forum

miro/boi avec afp

Sujet radio: Anne Andlauer