La malédiction des midterms a été levée — Genève Vision, un nouveau point de vue

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Le récit d’un Biden fourbu qui allait être emporté par la vague du furieux s’est révélé complètement faux. Au passage, sondeurs et éditorialistes ont à nouveau manqué de prudence et de lucidité. Joe Biden avait fait du scrutin un enjeu pour la démocratie. Il avait été aussitôt raillé, l’Amérique ayant beaucoup péché en la matière par le passé. Biden avait appelé à se mobiliser pour sauver le droit à l’avortement. Mais on croyait que le prix du gasoil et les craintes d’une récession joueraient un rôle plus décisif. Les résultats sont là. Les arguments du président, et d’Obama, ont porté. La malédiction des midterms a été levée.

Est-ce un retour à la raison, et à la sérénité ? L’institut anglais « Chatham House » le pense : « Une fois de plus, la démocratie américaine a surpris, et la sagesse des électeurs américains a déconcerté les experts et les sondeurs. Après six années sombres et folles, les Américains semblent avoir voté pour la stabilité et le calme ». C’est peut-être se réjouir un peu vite. Trump ne triomphe pas, et cela déjà suffit à rassurer le monde. Je dirais plutôt qu’il y a accalmie avant la prochaine échéance. Car le public de Trump n’a pas disparu. Dans ce duel de « vieux », Biden est le plus âgé, mais pas le plus faible. Le renard s’est joué du loup. Trump veut se représenter à la présidence à tout prix. Mais c’est peut-être Biden qui créera la surprise en voulant rempiler.

Trump n’est pas hors-jeu, loin de là. Mais il est contraint désormais de convaincre son propre parti qu’il est toujours le meilleur choix pour la course à la présidence. Une exigence contraignante. Il n’est plus jugé incontournable. L’alternative est possible. Le gouverneur Ron DeSantis a triomphé en Floride, et il est intéressé par le job. C’est un ultra-conservateur comme Trump, opposé à l’avortement.

Pas franchement de quoi nous émerveiller. Mais il est moins imprévisible. Nous n’en sommes plus à préférer le meilleur, mais à redouter le pire. Est-ce le signe du nouveau monde ? De la déréliction des temps ? Serions-nous prêts à faire des compromis inconfortables pour éviter la catastrophe ?

Le conservateur DeSantis est mu par l’ambition, non par la vengeance. Le sentiment est plus compréhensible, moins dangereux. N’est-il pas ? On se rassure comme on peut. DeSantis n’est pas Trump, on l’apprécierait presque. C’est dingue.

André Crettenand