La grande peur dans la ville — Genève Vision, un nouveau point de vue

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La frappe malencontreuse n’a pas provoqué la déflagration finale, mais elle est riche d’enseignements. Par un biais cognitif étrange, le missile a frappé certains esprits. On ne tenait plus compte de la pluie de missiles que la Russie envoyait sur les villes ukrainiennes. On oubliait que la situation était le résultat d’une invasion. Volodymyr Zelensky était-il le méchant manipulateur ? Et Vladimir Poutine soucieux de la paix ? Du coup, les exhortations se sont élevées, en France surtout, pour que le président ukrainien s’incline, accepte de négocier. Que penser de cet atermoiement d’un pays majeur de l’Union européenne ? Qu’il n’est toujours pas au clair dans sa relation avec la Russie ? L’hésitation coupable de qui n’a toujours pas compris quel était l’enjeu pour l’Europe : la liberté de tous.

L’homme vit depuis 9 mois dans un bunker et préside un pays bombardé, menacé tous les jours par l’agression russe. Il ose le doute. Il est suspect. Certains se réjouissaient presque de cet atermoiement, signe d’une « faute » évidente, impardonnable. Quelque chose d’indicible jusque-là était dit : dans cette guerre, il y aurait deux adversaires, à égalité. C’est faux, bien sûr.

La leçon la plus cruciale a été peu notée : la Russie a eu peur. Elle a réagi avec empressement, expliquant qu’elle n’y était pour rien, donnant force détails, comme le fait qu’elle évitait de bombarder une zone de 35 kilomètres près de la frontière polonaise. Elle était soucieuse de présenter les gages de sa bonne foi.

Poutine craint l’OTAN. L’ancien président François Hollande, qui a beaucoup pratiqué le dictateur, témoigne qu’il ne reconnaît que la force brutale. L’OTAN mesure là que Poutine craint bel et bien sa puissance.

Il semblait ne rien redouter. Tout oser. Il y a donc une limite à ne pas franchir. Qui est celle que définit l’OTAN. Le missile a tué des innocents. Mais sur le plan militaire, l’épisode du missile a quelque chose de rassurant.

André Crettenand