La Biélorussie sanctionnée: même pas mal! — Genève Vision, un nouveau point de vue

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Mais la punition aura-t-elle un effet ?

Les sanctions font partie de l’arsenal classique mis en œuvre dans les contentieux entre États. Les experts se divisent sur leur efficacité réelle. Nous en avons pourtant une longue expérience. Les plus célèbres sont celles qui furent décrétées à l’encontre de l’Afrique du Sud de l’apartheid. Le régime honni ne fut aboli qu’en 1991.

Les États-Unis ont des sanctions en cours contre une trentaine de pays, l’Union européenne, une vingtaine. La Russie, la Turquie, la Chine, la Corée du Nord et l’Iran font l’objet de sanctions internationales. Sans que nous ayons le sentiment qu’elles aient fait évoluer la situation. C’est plus souvent le contraire, les États punis s’entêtent et se butent.

Surtout, ce sont les populations civiles qui en souffrent. Même si les sanctions ciblent désormais les personnalités du régime. Et il y a toujours des pays amis et intéressés pour les violer allègrement, profitant au passage de faire de bonnes affaires et d’acquérir de l’influence.

L’Union européenne n’est pas naïve au point de croire que les mesures seront décisives. Mais les sanctions agissent comme un acte symbolique. Elles valent condamnations morales aux yeux du monde. Elles deviennent aussi un enjeu possible de négociation. Loukachenko demande la levée de celles dont il fait déjà l’objet. Et il a menacé de couper les conduites de gaz qui alimentent l’Europe, preuve qu’il n’est pas tout à fait indifférent à la menace.

Mais le dictateur tire son assurance du soutien indéfectible de Vladimir Poutine. Le président russe ne le laissera pas tomber de sitôt. Il n’a aucune envie de voir une Biélorussie libérale, démocratique, qui s’émanciperait et lorgnerait trop vers l’ouest. La punition européenne ne lui fait pas peur, ni mal.

Saisir l’OTAN ?

Ce qui se passe à la frontière est aussi et d’abord un drame humain, et je suis étonné que l’on ne s’en soucie pas davantage. La réponse européenne ne le résout en rien. Le gouvernement polonais n’a pas autorisé l’agence européenne Frontex à intervenir à la frontière. Elle interdit aux organisations humanitaires d’agir dans la zone, dérogeant aux plus élémentaires principes d’humanité. Elle arrose à coups de jet d’eau froide les migrants. Elle persiste dans son intention de faire de la crise migratoire une question d’abord militaire.

Bafouant d’ailleurs l’Europe, le premier ministre Mateusz Morawiecki annonce vouloir saisir l’OTAN sur la base de l’article 4 de la Charte, considérant que l’intégrité territoriale du pays, son indépendance politique et sa sécurité seraient menacées. On parle de 3000 ou 4000 migrants dont de nombreuses familles. Il est vrai que quelques-uns ont lancé des pierres.

Le refoulement n’est pas une solution

Filippo Grandi, le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a dénoncé la manipulation d’Alexandre Loukachenko, mais il a déploré aussi l’attitude de la Pologne. « Le sort de ces quelques milliers de personnes me semblait gérable, sans panique et sans l’idée que seuls la construction de murs et le refoulement seraient des solutions. Sans doute cela peut-il aider certains politiciens à gagner des élections, mais cela ne résout rien, et démontre, en outre, la vulnérabilité de l’Europe », dit-il dans une interview au Monde.

La Pologne a contribué à créer ce drame humanitaire. Elle viole allègrement les Conventions de Genève en refoulant, par exemple, les réfugiés qui ont réussi à passer.

Pour l’instant, l’Europe ne dit rien à ce sujet. Jusqu’à quand ?

André Crettenand

La Lettre internationale suite. Sanctions mode d’emploi  – #YAS2021, l’espoir jeunes – espace, jeu et guerre – Métavers, c’est nouveau – footgate belge – Xi fois Biden – métavers – Marc Voltenauer.