En Pologne, une activiste a été condamnée pour avoir aidé à un avortement — Genève Vision, un nouveau point de vue

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« Je ne me sens pas coupable, je n’accepte pas ce jugement », a-t-elle déclaré à la presse à la sortie du tribunal, annonçant qu’elle allait faire appel et qu’elle allait continuer à aider les femmes. « Rien n’a changé », a-t-elle ajouté. Les attendus de la décision de justice n’ont pas été rendus publics.

Justyna Wydrzynska, au centre, va faire appel suite à sa condamnation. [Keystone/AP Photo].

« Un dangereux précédent »

« La condamnation d’aujourd’hui constitue un nouveau gouffre dans la répression des droits reproductifs en Pologne: un recul pour lequel les femmes et les jeunes filles – et ceux qui défendent leurs droits – paient un lourd tribut », a commenté Agnès Callamard, la secrétaire générale d’Amnesty International, dans un communiqué.

« Cette affaire crée un dangereux précédent en Pologne, où l’avortement est presque totalement interdit, et donne un aperçu effrayant des conséquences des lois aussi restrictives », a-t-elle ajouté.

Me Anna Bergiel, l’avocate de Justyna Wydrzynska, a estimé que le tribunal voulait envoyer « un message à la société selon lequel un tel comportement, une telle aide, ne seront pas tolérés ».

Pour une association de juristes utracatholiques, « l’accusée, ainsi que tout l’environnement des militants (du droit de pratiquer) l’avortement, fait la promotion de l’avortement, y compris l’avortement pharmacologique, depuis des années, se moquant de la loi en Pologne ».

« L’arrêt dans l’affaire Justyna Wydrzynska doit donc être considéré comme une étape importante vers le respect réel du droit à la vie des enfants à naître en vigueur en Pologne », a insisté Magdalena Majkowska, d’Ordo Iuris, dans un communiqué.

44’000 avortements en 2022

L’activiste risquait jusqu’à trois ans de prison pour avoir « fourni une assistance » à cet avortement et « avoir mis sur le marché des médicaments sans autorisation », en vertu de la législation polonaise.

En 2020, une femme dans sa 12e semaine de grossesse et voulant l’interrompre a demandé de l’aide à Justyna Wydrzynska, dont le collectif Abortion Dream Team qu’elle a contribué à créer revendique avoir rendu possibles 44’000 avortements en 2022, soit 107 par jour.

Auparavant, cette femme voulait se rendre dans une clinique spécialisée dans les IVG en Allemagne mais son mari l’a empêchée de partir. Alors qu’elle attendait chez elle un colis avec les pilules, celui-ci a appelé la police qui a confisqué le médicament et ouvert une enquête. La femme a fait une fausse couche par la suite.

La Pologne, un pays de tradition catholique, disposait déjà de l’une des lois les plus restrictives d’Europe en matière d’avortements lorsque la Cour constitutionnelle s’est rangée l’an dernier du côté du gouvernement populiste-nationaliste en déclarant les interruptions de grossesse pour malformation foetale « inconstitutionnelles ».

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afp/jfe