Donner un statut juridique à la Mer Mineure pour la sauver? — Genève Vision, un nouveau point de vue

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C’est devenu un égout à ciel ouvert. Chaque été, depuis 2016, les eaux de la Mer Mineure prennent une inquiétante couleur verte. Un spectacle insupportable pour les riverains de cette lagune paradisiaque dévastée par la pollution liée à l’agriculture intensive.

Initiative populaire

« On en est à 640’000 signatures », a lancé l’avocat Eduardo Salazar lundi dans la 19h30. Lui et quelques voisins ont décidé de proposer une loi d’initiative populaire. En Espagne, ce genre de proposition doit recueillir au moins 500’000 signatures pour être votée par le Congrès. Ils ont dépassé cet objectif.

« Avec cette loi, la Mer Mineure aurait les mêmes droits qu’une personne! Cela permettrait à tout citoyen témoin d’une pollution d’attaquer devant un tribunal, car la Mer Mineure aurait des droits équivalents à ceux d’une victime. Un statut qui lui permettrait enfin de se défendre contre les pollueurs », explique Eduardo Salazar, promoteur de la loi d’initiative populaire.

Une première en Europe

Ce serait une première en Europe et un nouvel espoir pour la Mer Mineure face à l’inaction politique. L’océanographe Javier Gilabert alerte les autorités en vain depuis vingt ans. Chaque épisode de pollution tue des tonnes de poissons.

« Des micro-algues se développent à la surface, et quand elles meurent, elles se déposent au fond en consommant tout l’oxygène disponible. Or beaucoup de poissons vivent au fond de la lagune et ne peuvent s’échapper, ce qui provoque leur mort », développe Javier Gilabert, de l’Université polytechnique de Carthagène.

Les nitrates en cause

Les responsables de cette catastrophe écologique sont pourtant bien connus: les nitrates, les engrais utilisés dans l’agriculture intensive. A chaque pluie, ils atterrissent dans un canal, dont les eaux contaminées se déversent directement dans la lagune, en toute impunité.

« On connaît la principale source de pollution de la Mer Mineure. Ici, s’écoulent 1 à 4 tonnes de nitrates par jour. C’est beaucoup trop pour la lagune et c’est ce qui provoque la prolifération de microalgues », poursuite Javier Gilabert.

La loi devrait être adoptée d’ici quelques mois. Le premier pas d’un long processus: il faudra des années à l’écosystème de la Mer Mineure pour se reconstituer.

Auriane Loizeau/jpr