Denis Mukwege, prix Nobel de la paix, appelle à protéger les femmes qui fuient l'Ukraine — Genève Vision, un nouveau point de vue

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De passage vendredi à Genève pour l’inauguration officielle de l’ONG Global Survivors Fund (Fonds mondial pour les survivants), Denis Mukwege a fait part de ses craintes dans l’émission Forum sur la situation en Ukraine, et notamment les crimes de guerre qui menacent les femmes dans le pays.

« Une guerre, c’est toujours un drame pour la population. Notre expérience montre que dans toutes les guerres aujourd’hui, ce sont les femmes et les enfants qui en paient le lourd tribut », a déclaré Denis Mukwege au micro de la RTS. Les femmes en particulier sont ciblées, estime le médecin, qui a qualifié de « choquantes » les images des hôpitaux pédiatriques bombardés en Ukraine.

Une femme enceinte blessée après les bombardements russes sur une maternité à Marioupol est transportée sur un brancard. [Evgeniy Maloletka / AP Photo – Keystone].

Un risque élevé de viols

Au-delà de ces images spectaculaires, il y a également des événements tragiques invisibles. « On parle très peu de viols dans ce conflit, mais nous savons qu’avec des déplacements massifs de la population, le risque est grand », a souligné Denis Mukwege, plaidant pour des mesures de prévention. « Si rien n’est fait, cela va arriver », a-t-il affirmé.

Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba a d’ailleurs déjà accusé vendredi des soldats russes de « violer des femmes dans les villes ukrainiennes occupées », demandant la création d’un tribunal pénal spécial pour juger le « crime d’agression » commis par Vladimir Poutine.

Face à la situation, Denis Mukwege recommande notamment de conseiller les femmes sur place. Les personnes qui accueillent des réfugiées ukrainiennes devraient également être informées sur la manière de se comporter face à cette problématique, selon le prix Nobel.

Une responsabilité humanitaire

Denis Mukwege salue le fait que de plus en plus de femmes osent s’exprimer aujourd’hui sur les atrocités subies lors de conflits armés. « Il y a une libération de la parole, les femmes brisent le silence, même si parfois les belligérants ne veulent pas écouter. Je pense que nous devons y être attentifs, nous devons les accompagner et les protéger. »

Pour le Congolais, il est nécessaire de mettre en place des plans de protection humanitaires pour assister ces femmes en cas de violences sexuelles et leur éviter par exemple de tomber enceinte ou d’attraper des maladies sexuellement transmissibles, cela afin qu’elles ne soient pas victimes d’une « deuxième sanction ».

Propos recueillis par Pietro Bugnon

Adaptation web: Isabel Ares