Course contre le temps en Israël pour recueillir les récits des rescapés de la Shoah — Genève Vision, un nouveau point de vue

0

Des centaines de rencontres avec les derniers témoins de la Shoah sont aussi organisées à travers tout le territoire, à destination notamment de la jeunesse. « Jusqu’à un âge très avancé, il ne savait pas qu’il était juif. Quand il l’a découvert, il est venu habiter en Israël. Aujourd’hui, il a 80 ans et a fait sa bar-mitzvah (communion juive, ndlr) il y a quelques années. C’est très important pour moi d’entendre ce genre d’histoires, comme ça je pourrai les transmettre aux générations suivantes », raconte un jeune homme de Jérusalem venu assister à une rencontre, mardi dans le 12h30 de la RTS.

La transmission de la mémoire de la Shoah revêt un caractère d’urgence en Israël, où les survivants ne sont plus qu’une poignée. « Le rescapé philosophe et prix Nobel Elie Wiesel a dit que si vous écoutiez un témoignage, vous deveniez vous-même un témoin. C’est en grande partie pour cela que nous organisons ces rencontres », rapporte une jeune femme.

Ecouter le reportage du 12h30 à Jérusalem: Israël commémore la Shoah et cherche à toucher les plus jeunes

Rencontres en petit comité

Recueillir les témoignages des derniers rescapés est une réelle course contre la montre. Chaque jour, une cinquantaine d’entre eux disparaissent et emportent des récits individuels de la Shoah.

Les rencontres avec les nouvelles générations sont parfois organisées à domicile, dans le salon d’un particulier, devant un petit comité composé d’étudiants israéliens et étrangers. En Israël, le concept est en vogue. Il doit permettre de rendre le témoignage plus fort et concernant.

« Le but est de rassembler autant de jeunes que possible pendant qu’il est encore temps. La Shoah a eu lieu il y a très longtemps et il reste peu de survivants. Ce genre de soirées nous donne l’occasion de transmettre. Ce que nous avons entendu ici, nous le diffuserons dans notre pays ou à l’étranger », précise Noa Borochov, organisatrice d’une de ces soirées, dans le 19h30.

Une transmission par hologrammes

Et pour que ces témoignages ne disparaissent pas avec les derniers rescapés, la technologie vient au secours de la mémoire. Des dizaines de survivants enregistrent aujourd’hui leurs récits afin d’apparaître après leur mort sous forme d’hologramme.

« C’est un moyen très émouvant pour connecter les générations », affirme Moran Zipper, membre du comité d’organisation du projet « Mémoire dans le salon ». « On a l’impression que c’est raconté par le vrai personnage. Ce procédé nous garantit que la mémoire sera transmise aux générations futures. »

Du côté des rescapés du génocide nazi, certains voient le projet d’un bon oeil: « Quand je ne serai plus là, cela me permettra de continuer à raconter mon histoire directement et pas à travers un film ou un livre. J’espère que cela servira à quelque chose », se livre Dvora Weinstein.

Les témoignages holographiques seront diffusés dans des salons de particuliers ou dans des lieux publics comme les centres commerciaux. La transmission de la mémoire de la Shoah entrera alors dans une nouvelle ère.

Sujet radio et TV: Stéphane Amar

Adaptation web: Isabel Ares

Une marche commémorative

Une quarantaine de survivants et survivantes de la Shoah ont conduit mardi dix mille personnes dans une Marche des Vivants commémorant les victimes du camp de la mort d’Auschwitz-Birkenau à Oswiecim, en Pologne, à la veille du 80e anniversaire du soulèvement du ghetto de Varsovie.

Chaque année, des milliers de jeunes, juifs et non-juifs, du monde entier, participent à cette marche organisée sur le site, symbole du génocide perpétré par l’Allemagne nazie à l’encontre de six millions de Juifs, dont un million sont morts dans ce camp entre 1940 et 1945.

Le signal de départ de cette 35e Marche des Vivants a été donné par un son de shofar, corne traditionnelle, devant le tristement célèbre portail « Arbeit Macht Frei » (Le travail vous rendra libre). Les participantes et participants ont parcouru les trois kilomètres séparant le camp d’Auschwitz de celui de Birkenau. Le président italien Sergio Mattarella, ainsi que le ministre israélien de l’Education Yoav Kisch ont également pris part à la marche.

Des survivants de la Shoah et des participants avant le début de la Marche des Vivants sur le site de l’ancien camp de concentration et d’extermination nazi d’Auschwitz-Birkenau à Oswiecim, le 18 avril 2023. [Artur Widak / Anadolu Agency – AFP]

Appel à la décence au Mémorial d’Auschwitz

Le Mémorial d’Auschwitz a lancé un appel à la décence après la publication sur Twitter de la photo d’une jeune femme se mettant en scène sur les rails menant à l’ancien camp nazi, aujourd’hui érigé en lieu de mémoire.

« Les images peuvent représenter une valeur émotionnelle et documentaire immense pour nos visiteurs. Les photos nous aident à nous souvenir. Lorsqu’ils visitent le Mémorial d’Auschwitz, les visiteurs doivent garder à l’esprit qu’ils entrent dans l’ancien camp où plus d’un million de personnes ont été assassinées. Respectez leur mémoire. »

Le Mémorial a écrit ce message en anglais sous le tweet d’une journaliste britannique publié le 15 avril et vu près de 30 millions de fois, dans lequel la journaliste s’insurge d’une telle attitude. « Aujourd’hui, j’ai vécu l’une des expériences les plus poignantes de ma vie. Malheureusement, tout le monde ne semble pas l’avoir trouvée aussi poignante », a-t-elle commenté en partageant le cliché.

Today I had one of the most harrowing experiences of my life. Regrettably it didn’t seem everyone there found it quite so poignant. pic.twitter.com/3OdWavqC4P

— Maria 🇬🇧 (@MariaRMGBNews) April 15, 2023

Ce n’est pas la première fois que le Mémorial rappelle à l’ordre ses visiteurs. En mars 2019, le musée leur avait notamment demandé de ne plus chercher à faire des selfies acrobatiques dans l’enceinte du camp. « Il existe de meilleurs endroits pour apprendre à marcher sur une poutre en équilibre que le site qui symbolise la déportation de centaines de milliers de personnes jusqu’à la mort », avait-il alors précisé.