Coupe du monde 2022: le Qatar a espionné la FIFA pendant 9 ans — Genève Vision, un nouveau point de vue

0

Pendant 9 ans et sur les 5 continents, jusqu’à 66 agents auraient été contactés pour pirater les mails et mettre sur écoute les hauts fonctionnaires du football. Budget total de l’opération: 387 millions de dollars.

C’est à Zurich que le chef des espions et ses commanditaires qatariens se sont rencontrés. Sepp Blatter, alors président de la FIFA, aurait été dans le viseur des espions à son insu. « J’ai remarqué de temps en temps que mon téléphone était sur écoute et que dans mon entourage des gens transmettaient des informations qu’ils ne devaient pas. Que cela ait été une affaire d’espionnage organisée au sein de la FIFA, cela me surprend et c’est inquiétant », a déclaré Blatter.

Le Qatar dénonce une campagne contre son pays

Ce nouveau scandale éclabousse le Qatar moins de 3 semaines avant le début de la Coupe du monde. L’Etat du Qatar n’a pas répondu aux accusations. Directement mis en cause, l’émir du Qatar dénonce une campagne contre son pays. La FIFA n’a pour l’heure pas pris position.

Les recherches de « SRF Investigativ » montrent pour la 1re fois en détail comment l’Etat du Qatar a fait espionner pendant des années des hauts fonctionnaires du football mondial. Même les opposants à la Coupe du monde ont été pris pour cible. Le but déclaré étant qu’il n’y ait aucun changement de position et aucune alliance potentiellement dangereuse qui n’échappe au Qatar. Afin de s’assurer que rien ne puisse mettre en danger l’organisation de la Coupe du monde 2022.

Pour s’en assurer, le Qatar a fait appel à une entreprise américaine: Global Risk Advisors. Société composée d’anciens collaborateurs des services secrets américains. Elle est d’ailleurs dirigée par un ancien espion de la CIA: Kevin Chalker.

Différents objectifs

L’objectif n’était pas seulement de se procurer des informations. L’enquête de SRF permet de conclure qu’au cours des 10 dernières années, il y avait une main invisible à la FIFA qui tentait de tirer les ficelles. Les espions auraient donc réussi à pénétrer l’organe suprême du football, accessible uniquement au comité exécutif de la FIFA.

Les documents révèlent que – dans un premier temps – avant l’attribution de la Coupe du monde, Global Risk Advisors a espionné les candidatures adverses. Puis, lorsque le Qatar a remporté la mise, et que des critiques se sont élevées à propos de la corruption et des violations de droits de l’homme dans le pays, l’objectif a changé. Il s’agissait désormais d’empêcher par tous les moyens que la FIFA ne retire la Coupe du monde au Qatar. Pour cela, des campagnes globales de diffamation ont été lancées à l’encontre de ceux qui pouvaient remettre en cause cette attribution.

L’actuel chef de l’Etat qatari – Tamim bin Hamad Al Thani – se serait d’ailleurs personnellement investi en ordonnant l’obtention de listes détaillées d’appels et de SMS de plusieurs membres du comité exécutif de la FIFA avant l’attribution de la Coupe du monde.

A écouter aussi: l’interview de Sébastien-Yves Laurent, professeur d’histoire à l’Université de Bordeaux et à Sciences Po Paris.

Insuffisance de preuves pour le Ministère public zurichois

Des recherches montrent que le Ministère public zurichois semblait être au courant très tôt d’un réseau d’espionnage. Il savait que des tentatives de piratages avaient eu lieu depuis 2012. Cependant, et bien qu’il était évident qu’il s’agissait d’une affaire de grande envergue, le Ministère public zurichois n’a semble-t-il pas cru bon de mener une enquête sérieuse. Et finalement, 8 ans après, le parquet a classé l’affaire en raison d’une prétendue insuffisance de preuves.

srf/pza

A lire aussi: le Qatar dit non à un fonds d’indemnisation pour les ouvriers