Bertrand Piccard: „On ne peut pas continuer à faire croire que ça va être sacrificiel” — Genève Vision, un nouveau point de vue

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Invité sur le plateau du 19h30 de la RTS dimanche, Bertrand Piccard a jugé cet accord final très décevant. « Dans un processus onusien, personne ne prend le risque de ne pas avoir d’accord. Et finalement, l’accord est toujours indexé sur les moins ambitieux. Donc ça ne peut que décevoir », a expliqué le psychiatre et explorateur, qui a passé les deux semaines de la COP26 à Glasgow.

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A la COP, personne ne prend de risques

S’il peut être tentant d’attribuer à la Chine et à l’Inde le résultat peu spectaculaire obtenu au terme de la COP26, Bertrand Piccard souligne que les autres pays ne sont pas innocents non plus, à commencer par la Suisse: « C’est assez facile de critiquer ceux qui ne font pas assez. Cela fait peut-être un peu oublier que chez nous, on ne fait pas beaucoup mieux. En Suisse, on a le parc automobile le plus émetteur de CO2 d’Europe », pointe-t-il du doigt.

C’est assez facile de critiquer ceux qui ne font pas assez. On ne fait pas beaucoup mieux. En Suisse, on a le parc automobile le plus émetteur de CO2 d’Europe

Evoquant le récent refus suisse de la loi sur le C02, il rappelle la difficulté de faire adopter de « vraies » mesures par une population. Et comme les engagements au niveau de la COP doivent ensuite être ratifiés par les parlements, personne ne prend le risque d’aller trop loin, analyse Bertrand Piccard.

L’une des solutions, selon lui, est de rassurer les gouvernements, de leur donner une légitimité pour agir. « C’est pour ça qu’il est important que les écologistes et que les jeunes manifestent », estime l’aventurier-psychiatre.

Il faut donner une légitimité aux gouvernements pour agir. C’est pour ça que c’est important que les écologistes et que les jeunes manifestent

Une transition « inclusive au lieu d’être clivante »

Autre axe à suivre, montrer à la population qu’elle n’a rien à perdre, même à court terme, avec la transition énergétique. « On ne peut pas continuer à faire croire que la transition climatique va être chère, sacrificielle. Il faut montrer au contraire que c’est une opportunité économique dans des tas de développements industriels et financiers. Qu’elle peut être inclusive, fédératrice au lieu d’être clivante », insiste Bertrand Piccard.

Il estime que la population a son rôle à jouer, notamment en consommant davantage local, ou encore en chauffant son logement à 20 degrés au lieu de 25, « une économie d’énergie de 40% ». Mais il faut agir aussi et surtout au niveau législatif: « Il faut des standards environnementaux plus ambitieux, qui tirent vers le marché toutes les solutions qui permettent d’être plus efficient et écologique, de moins gaspiller. S’il n’y a pas un cadre légal qui évolue au même rythme que les solutions, on restera dans de grandes palabres. »

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Des prêts pour toute la population

Si l’éco-explorateur reconnaît que changer les modes de vie est extrêmement difficile à obtenir, tel n’est pas le cas, selon lui, de tout ce qui est rénovation, modernisation, efficience énergétique et énergies renouvelables, des éléments « économiquement rentables » aujourd’hui.

« Ceux qui peuvent investir dedans en profitent. Ceux qui ne peuvent pas doivent être aidés », avec des prêts à taux zéro par exemple. « On peut très bien aider toute la population à changer », plaide-t-il.

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Propos recueillis par Jennifer Covo

Adaptation web: Vincent Cherpillod