Barbara Hendricks: „La démocratie n'est pas donnée, elle doit être gagnée par chaque génération” — Genève Vision, un nouveau point de vue

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Selon elle, la vie, malgré ses difficultés, est et restera toujours quelque chose de beau. Elle le clame régulièrement haut et fort sur les plateaux, comme sur celui d’#Helvetica ce samedi. Certes, la vie est une lutte perpétuelle, mais elle en vaut la peine, insiste-t-elle.

Ce leitmotiv l’a suivie tout au long de son existence. Elle y croit fort, et le contexte actuel compliqué, marqué notamment par les conflits à travers le monde, n’y change rien. « Il faut continuer à lutter », souligne-t-elle. Avant de poursuivre: « Et pour ce faire, j’ai beaucoup d’espoir dans les jeunes de la génération de mes enfants et de mes petits-enfants, car ils n’acceptent pas le monde comme il est. La démocratie n’est pas donnée, elle doit être gagnée par chaque génération. »

50 ans de carrière musicale

Barbara Hendricks, c’est plus de 50 ans de carrière musicale. Cinq décennies au cours desquelles elle a fait vibrer les plus grandes scènes du monde. L’incroyable vocaliste s’illustrera d’ailleurs ce dimanche au Cully Jazz Festival, où elle explorera les racines du blues avec « The Road to Freedom ». Comme elle l’explique à la RTS, il s’agit d’une sorte de célébration de la musique comme vecteur des droits humains. La pensée de Martin Luther King – un mentor pour elle – est en effet omniprésente tout au long de cet opus. Une présence qui se traduit au travers de citations disséminées un peu partout dans ses morceaux.

« La philosophie de Martin Luther King est toujours actuelle aujourd’hui, car il parlait d’amour et du rejet de la haine. Et la solution contre les conflits, c’est justement, selon moi, l’amour. Je trouve son message pas seulement fort mais nécessaire aujourd’hui », souligne-t-elle.

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Fille de pasteur

Outre sa carrière musicale brillante, Barbara Hendricks est également une femme de coeur qui a su profiter de sa notoriété pour s’engager auprès des plus démunis, et notamment des réfugiés. Née le 20 novembre 1948 à Stephens en Arkansas, au sud des Etats-Unis, elle est la fille d’un pasteur et d’une institutrice. Elle est vite remarquée lors de ses interprétations aux cultes dominicaux.

« Je chantais aux obsèques, aux mariages ou quand on avait besoin de moi », se souvient-elle. Pour elle, le chant s’est imposé tout naturellement. « Je ne peux pas dire que j’ai appris à chanter. Je chantais parce que je pouvais le faire, c’était naturel. » C’est alors qu’elle reçoit une bourse pour ses études. Tout bascule rapidement. Une fois diplômée en mathématiques et en chimie, elle intègre à 21 ans la prestigieuse Juilliard School à New York. Son début de carrière est fulgurant. Elle brille dans le récital, l’opéra et le jazz.

Malgré tout, ce n’est pas la voie que ses parents espéraient pour elle, du moins au début. « Pour mes parents, les diplômes que j’avais reçus étaient la clé pour réussir, surtout pour une jeune fille noire née dans l’Arkansas. Et ils pensaient qu’en allant à New York je jetais tout cela à la poubelle. » Mais ses parents se sont vite ravisés. « Après, mon père disait qu’au fond de lui il avait toujours su que j’allais chanter. »

Elle fonde le Verbier Festival en 1994

Elle s’installe en Suisse durant les années 1970 avec son premier mari, le musicien suédois Martin Engström. Ensemble, ils créent en 1994 le Verbier Festival. L’année précédente, Barbara Hendricks participe au Montreux Jazz festival et y reviendra 10 ans plus tard.

Mais au-delà de sa voix unique, l’Américaine d’origine qui possède aujourd’hui la nationalité suisse est aussi connue pour ses engagements envers les réfugiés. Depuis 1987, la cantatrice s’investit auprès du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et part régulièrement sur le terrain. Elle a d’ailleurs reçu le titre d’Ambassadrice honoraire du HCR à vie. Elle milite aussi contre le racisme et la xénophobie.

Une vie bien chargée, en somme, et peut-être bénie des dieux? « Je suis très curieuse et je pense que j’avais des anges sur mon parcours », répond-elle. « Un peu partout, j’ai rencontré des gens, des professeurs qui m’ont donné un petit coup de pouce pour aller dans une direction ou une autre ». Sans eux, elle ne serait pas l’artiste et la philanthrope qu’elle est devenue.

Propos recueillis par Philippe Revaz
Adaptation web par Fabien Grenon