Agnès Callamard: „Il ne faut pas être Haut-Commissaire aux droits de l'homme pour être populaire” — Genève Vision, un nouveau point de vue

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Agnès Callamard reconnaît toutefois qu’elle a « démontré du leadership » lors de la crise pandémique du Covid-19, en promouvant « une approche sur les droits humains ». « Elle a aussi été à l’avant-garde de plaidoyers sur l’inégalité, la pauvreté, la migration et le changement climatique », souligne-t-elle, vendredi dans l’émission de la RTS « Tout un Monde ».

Mission « très difficile »

Agnès Callamard insiste sur le fait que la mission est « très difficile », d’autant plus que le contexte international est, lui-même, compliqué: les menaces contre les droits humains sont « considérables », le nombre de conflits armés est « croissant », une récession économique mondiale se profile… « Le monde est près d’un abysse », alerte-t-elle.

Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International

Le successeur de Michelle Bachelet devrait être nommé « assez rapidement » par le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, « dans quelques semaines au plus tard ». Selon Agnès Callamard, il faudra une personne « courageuse », avec « d’excellentes compétences diplomatiques » et connaissant les ONG. « Le Haut-Commissaire se fait attaquer constamment. Si vous voulez être Monsieur ou Madame popularité, il ne faut pas faire ce travail », dit-elle.

D’ailleurs, seule la Sud-Africaine Navi Pillay fait exception, avec un mandat et demi mené de 2008 à 2014. « Nous, les ONG, voulons quelqu’un qui communique, mais nous reconnaissons qu’un Haut-commissaire va aussi travailler en ‘privé’, discuter avec les capitales et les diplomates sans le faire de façon bruyante », indique Agnès Callamard.

Un rapport sur Xinjiang très attendu

Michelle Bachelet, dont c’était mercredi le dernier jour à la tête du Haut-Commissariat, a tenu in extremis sa promesse en publiant le rapport sur les violations présumées des droits de l’homme dans la région chinoise du Xinjiang, peu avant minuit à Genève.

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« Ce rapport change la donne, estime la secrétaire générale d’Amnesty International. Il va mettre la communauté internationale devant ses responsabilités. Elle pouvait tourner la tête et les yeux loin de ce que nous, les ONG, avions dit. Mais le Conseil des droits de l’homme des Nations unies n’a pas le choix: il va devoir se confronter aux vérités de ce rapport. Nous espérons qu’il va mettre en place une commission d’enquête. »

Les réponses de la Chine sont intégrées au rapport. Elle continue de parler de formation, niant toute exaction contre les Ouïghours. Elle met aussi en avant un concept de droits de l’homme collectifs, en opposition aux droits de l’homme individuels. « Il ne fait aucun doute, quelle que soit la perspective que vous prenez, que la Chine viole les droits individuels et collectifs des Ouïghours musulmans en Chine », affirme Agnès Callamard.

Propos recueillis par Eric Guevara-Frey/vajo